A Herculanum, ce village enfouis dans les cendres du Vésuve il y a 2000 ans, ont été retrouvé des dizaines de rouleaux de papyrus carbonisés. Des parchemins trop fragiles pour être déroulés. Mais trois jeunes scientifiques, dont un Bâlois, ont percé leurs mystères, sans les ouvrir à l’aide de l’intelligence artificielle. De quoi peut-être réécrire l’histoire du monde antique.
Ils ressemblent à une buche calcinée, mais ce sont des rouleaux de papyrus très anciens et carbonisés. Qui parlent de nourriture, de musique, des plaisirs de la vie il y a 2000 ans. On le sait grâce à trois étudiants, qui ont utilisé l’intelligence artificielle pour les lire sans les ouvrir.
Parmi eux, un jeune roboticien bâlois: « Mon travail a été de les dérouler sur l’écran, avec des algorithmes », explique Julian Schilliger, roboticien à l’EPF de Zurich. Avec ses acolytes, un Egyptien et un Américain, il remporte ainsi un concours doté de 700’000 dollars, dont l’histoire débute au XVIIIe siècle.
Ces rouleaux ont été découvert à Herculanum, près de Pompeï, où ils sont enfouis sous les cendres du Vésuve depuis l’an 79. Mais impossible de les dérouler sans les réduire en miettes. Ils sont donc conservés précieusement, notamment à l’Institut de France, à Paris.
En 2019, un chercheur utilise le synchrotron Diamond Light Source, basé à Oxford, immense scanner à rayons X, pour les ausculter, tranche par tranche. « Ces rayons X pénètrent l’échantillon, et créent une image haute résolution en 3D, pas seulement de la surface, mais de tout ce qu’il y a dedans », détaille Brent Seales, Professeur de sciences computationnelles à l’Université du Kentucky (Etats-Unis). Problème : l’encre sur ces papyrus numérisée est très peu visible, et nécessiterait à l’homme des milliers d’heures de lecture acharnée, couche après couche.
Pêche miraculeuse
.Entre alors en scène l’intelligence artificielle : « Nous avons entraîné l’algorithme sur les rouleaux, explique Julian Schilliger. On lui a donné des morceaux de papyrus numérisé où il y a des zones d’encre, et d’autres sans écriture. Au final, l’algorithme a appris tout seul où il voyait de l’encre. » De quoi faire apparaître des textes.
Et subjuguer les spécialistes, comme Paul Schubert, professeur au Département des sciences de l’antiquité à l’Université de Genève: « Cela fait deux siècles et demi qu’on attend de trouver un moyen de lire ces textes, sans endommager les rouleaux. Et là, ces chercheurs y sont parvenus. Pour l’instant on a réussi à établir les passages d’un texte grec, mais qui n’a pas encore été étudié dans le détail. Donc cela va être la pêche miraculeuse, d’une certaine manière. »
D’autant qu’il reste des dizaines d’autres rouleaux carbonisés. Assez peut-être pour réécrire l’histoire du monde antique