L’une des découvertes astronomiques les plus fantastiques de l’année 2014, voire du siècle, celle des ondes cosmologiques primordiales générées à l’origine de l’Univers, vient d’être invalidée par un consortium de chercheurs français après une nouvelle analyse croisée des données. Se clôt ainsi un feuilleton qui a tenu en haleine la communauté des cosmologistes
L’une des découvertes astronomiques les plus fantastiques de l’année 2014, voire du siècle, concernant l’origine de l’Univers, vient d’être invalidée par un consortium de chercheurs français. Se clôt ainsi un feuilleton qui a tenu en haleine la communauté des cosmologistes.
En mars 2014, des physiciens du Harvard-Smithsonian Center for Astrophysics de Cambridge (Etats-Unis) annonçaient avoir détecté pour la première fois – mais indirectement –, avec le télescope Bicep2 basé au pôle Sud, ce qui pouvait être l’empreinte visuelle d’ondes gravitationnelles primordiales, soit la signature des toutes premières secousses du Big Bang, et qui constituaient ainsi la preuve intrinsèque de cette gigantesque explosion, il y a 13,8 milliards d’années. De quoi prétendre à un Prix Nobel!
Durant le printemps, un scepticisme s’est répandu parmi les astrophysiciens. D’aucuns ont estimé que la polarisation de lumière observée dans cette étude – une propriété décrivant l’orientation unique des oscillations des ondes lumineuses –, et présentée comme créée à l’aube de l’Univers, pouvait avoir été générée par les poussières présentes dans notre galaxie, la Voie lactée.
En septembre, pour tirer l’affaire au clair, les scientifiques ont décidé de comparer ces données à celles d’un autre télescope, spatial car de l’ESA, Planck, qui passe aussi son temps à observer le «fond diffus cosmologique», ce rayonnement fossile datant de seulement 380 000 ans après le Big Bang. Les résultats seront publiés le 3 février dans les Physical Review Letters, mais ils ont fuité vendredi sur le Web, imposant à leurs auteurs de communiquer.
Dans les barres d’erreur
Contacté, l’un d’eux, François Bouchet (Institut d’astrophysique de Paris et CNRS), explique qu’«après avoir ôté du signal observé les contributions des poussières galactiques ainsi que celles dues à la distorsion de la polarisation de la lumière par les grosses distributions de masses présentes sur son passage lors de son voyage à travers l’Univers [selon un phénomène dit de «lentille gravitationnelle»], ce qui reste du signal se retrouve caché dans les barres d’erreur des mesures et des instruments, ne permettant pas de conclure à une signature des ondes gravitationnelles primordiales.»
Ce qui ne veut pas dire que celles-ci n’existent pas. Mais le Prix Nobel attendra.